La Corte Europea dei Diritti dell'Uomo, con la pronuncia resa il 28 giugno 2012, nel caso Affaire Ressiot et Autres c. France ha riscontrato una violazione dell'art. 10 della Convenzione Europea dei Diritti dell'Uomo (libertà di espressione) con riferimento ad operazioni di “perquisizione” e “sequestro” di stampati aventi ad oggetto la pubblicazione di notizie coperte da segreto istruttorio.
La vicenda de qua concerneva la pubblicazione – da parte di alcuni giornalisti dell'équipe e del Le Point – di intercettazioni telefoniche e altri documenti processuali relativi ad un'inchiesta sul doping nel ciclismo.
Le autorità francesi, per scoprire le modalità con le quali i suddetti giornalisti erano entrati in possesso dei documenti segreti, hanno portato a termine “perquisizioni massicce e spettacolari” nella redazione e nell'abitazione degli stessi ed hanno, altresì, proceduto a sottoporre gli stessi ad intercettazioni telefoniche.
La Corte dei Diritti dell'Uomo, investita della questione, ha, sostanzialmente, accolto le rimostranze dei giornalisti che, per l'appunto, lamentavano la lesione del diritto alla libertà di espressione.
In particolare la Corte ha, in principio, ricordato che la libertà d'espressione e di stampa costituisce uno dei fondamenti essenziali d'una società democratica e che la protezione della riservatezza delle fonti è uno dei capisaldi della libertà di stampa (Goodwin c. Royaume-Uni, arrêt du 27 mars 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-II, § 39 ; Roemen et Schmit c. Luxembourg, no 51772/99, § 57, CEDH 2003-IV ; Ernst et autres c. Belgique, no 33400/96, § 91, 15 juillet 2003 et Tillack c. Belgique, no20477/05, § 53, 27 novembre 2007). Di conseguenza, ogni restrizione alla libertà di espressione e di stampa deve essere giustificata da una ragione di interesse generale e deve risultare proporzionata allo scopo.
Nel caso in esame, la Corte ravvisa la ragione di interesse generale nell'esigenza di impedire la divulgazione di informazioni riservate, proteggere la reputazione altrui e garantire l'autorità e l'imparzialità del sistema giudiziario.
Il punto era stabilire se le azioni intraprese dalle autorità francesi fossero o meno giustificate e proporzionate al raggiungimento dello scopo.
Al riguardo, la Corte ha rilevato che tali azioni furono intraprese dopo circa cinque mesi dalla pubblicazione degli articoli de quibus e che, di conseguenza, apparivano esclusivamente finalizzate a rivelare le “fonti” dei giornalisti, ragion per cui non potevano considerarsi “giustificate” e “proporzionate”.
Di conseguenza, i giudici europei, ribadendo che la “riservatezza delle fonti” non è un semplice privilegio riconosciuto al giornalista, bensì un “diritto indispensabile alla libertà di stampa affinché la collettività sia informata su questioni scottanti”, hanno, quindi, affermato – in nome dell'essenzialità della libertà di stampa in un sistema democratico – che non sono legittime misure invasive nei confronti dei giornalisti.
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COUR EUROPEENE DES DROITS DE L'HOMME
CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE RESSIOT ET AUTRES c. FRANCE
(Requêtes nos 15054/07 et 15066/07)
ARRÊT
STRASBOURG
28 juin 2012
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme
Dans l’affaire Ressiot et autres c. France,
La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :
Dean Spielmann, président,
Mark Villiger,
Karel Jungwiert,
Boštjan M. Zupančič,
Ann Power-Forde,
Angelika Nußberger,
André Potocki, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 5 juin 2012,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A l’origine de l’affaire se trouvent deux requêtes (nos 15054/07 et 15066/07) dirigées contre la République française et dont cinq ressortissants de cet Etat, M. Damien Ressiot et Mme Dominique Issartel et MM. Labbé et Decugis et Mme Recasens (« les requérants »), ont saisi la Cour le 27 mars 2007 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Les requérants sont représentés respectivement par Me B. Ader et Me R. Le Gunehec, avocats à Paris. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme E. Belliard, directrice des Affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères.
3. Les requérants alléguent en particulier une violation de l’article 10 de la Convention et notamment du principe du secret des sources des journalistes.
4. Le 18 mars 2010, le président de la cinquième section a décidé de communiquer les requêtes au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.
5. Tant les requérants que le Gouvernement ont déposé des observations écrites sur la recevabilité et le fond de la requête. En outre, une contribution commune a été reçue de deux organisations non gouvernementales, le syndicat national des journalistes et la fédération internationale des journalistes, représentés devant la Cour par Me A. Guedj, avocat à Paris, qui avaient été autorisés par le président à intervenir dans la procédure écrite en tant que tierces parties (articles 36 § 2 de la Convention et 44 § 2 du règlement de la Cour alors en vigueur).
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
6. Les requérants sont nés respectivement en 1964, 1967, 1967, 1963 et 1970. Les deux premiers requérants résident à Ormesson-sur-Marne et à Meudon respectivement. Les trois autres requérants sont domiciliés au siège de l’hebdomadaire Le Point, à Paris.
7. Ces requêtes portent sur des investigations menées dans les locaux des journaux L’Équipe (quotidien sportif) et Le Point (hebdomadaire). Les requérants sont cinq journalistes écrivant dans ces journaux à l’époque des faits.
8. En 2004, une instruction judiciaire fut diligentée concernant le dopage éventuel de coureurs cyclistes appartenant à l’équipe « Cofidis ».
9. L’hebdomadaire Le Point daté du 22 janvier 2004, publia un article signé des troisième, quatrième et cinquième requérants. Cet article reprenait in extenso certains passages des procès-verbaux de transcriptions d’écoutes téléphoniques pratiquées dans le cadre de l’enquête diligentée par la brigade des stupéfiants pour usage de substances prohibées mettant en cause un soigneur et des coureurs cyclistes ayant appartenu ou appartenant à l’équipe « Cofidis ».
10. Le 29 janvier, un nouvel article parut dans Le Point sous la signature des mêmes journalistes. Il donnait la liste des produits découverts chez un ancien coureur cycliste lors d’une perquisition effectuée le 13 janvier précédent.
11. Le 2 février 2004, une enquête préliminaire fut ouverte par l’Inspection générale des services (IGS) de la police nationale à la suite à cette publication.
12. Le 4 février 2004, le parquet de Nanterre demanda à l’IGS une enquête visant les mêmes faits.
13. Le chef de la brigade des stupéfiants, entendu sur ces faits le 3 février 2004, donna les noms des six fonctionnaires chargés de l’enquête sur les faits de dopage et ceux de deux autres fonctionnaires qui avaient eu des contacts avec les journalistes du Point, début 2003, dans le cadre d’un reportage sur la brigade.
Un autre fonctionnaire de police, entendu le 9 février suivant, remit à cette occasion le relevé détaillé de ses communications téléphoniques. Ce relevé permit d’établir, dès cette date, que ce lieutenant de police avait eu des contacts répétés avec le troisième requérant.
14. Le 11 février 2004, l’IGS adressa des réquisitions notamment aux opérateurs téléphoniques afin d’obtenir les factures détaillées des appels sortants et entrants à partir des vingt-huit postes utilisés par les dix policiers en cause. Les réponses des opérateurs furent fournies les 16 et 20 février 2004.
15. Les 5 et 10 mars 2004, des demandes identiques furent faites concernant les numéros de téléphone des trois journalistes et le numéro du standard du Point. Les réponses furent apportées les 9 et 17 mars 2004.
16. Un tableau général des conversations téléphoniques entre les policiers et les journalistes fut dressé le 31 mars 2004 à partir de l’ensemble des communications des policiers concernés.
17. Au vu de ces éléments, la procédure fut transmise au procureur de la République de Nanterre à une date non précisée.
18. Le 8 avril 2004, les sociétés Cofidis et Cofidis compétition délivrèrent une assignation en référé concernant un article qui devait paraître le lendemain dans le journal l’Équipe. Elles invoquaient le caractère injurieux des propos, une atteinte portée à la présomption d’innocence et au secret de l’instruction. Par ordonnance du 13 avril 2004, le tribunal de grande instance de Nanterre débouta les demanderesses de leur action.
19. Les 9 et 10 avril 2004, le quotidien L’Équipe publia une série d’articles portant sur le même sujet et reproduisant in extenso des parties des procès-verbaux et des pièces de procédure.
20. Le 15 avril 2004, les sociétés Cofidis et Cofidis compétition portèrent plainte avec constitution de partie civile contre X du fait de violation du secret de l’information et recel.
21. Le juge d’instruction chargé du dossier de dopage fut entendu le 3 octobre 2004. Il fournit aux enquêteurs diverses pièces de procédure dont des interrogatoires, auditions et retranscriptions d’écoutes téléphoniques.
22. Le 22 septembre 2004, le magistrat instruisant les faits de violation du secret de l’instruction et recel délivra une commission rogatoire à l’IGS pour poursuivre l’enquête concernant l’article paru dans Le Point le 22 janvier 2004.
Le 24 septembre 2004, le juge d’instruction délivra une commission rogatoire concernant les faits reprochés aux journalistes de l’Équipe, en exécution de laquelle les deux premiers requérants ainsi qu’un autre journaliste et le directeur adjoint de la rédaction furent entendus par la brigade criminelle.
Par commission rogatoire du 5 octobre 2004, il fit mettre sous surveillance les téléphones portables de trois policiers et du troisième requérant pour une durée d’un mois.
23. Les deux premiers requérants furent entendus les 7 et 9 octobre 2004 et fournirent les numéros de téléphone et de télécopies qu’ils utilisaient respectivement au journal. Sur réquisition adressée à l’opérateur en décembre 204, les enquêteurs obtinrent le listing des appels émis et reçus sur ces lignes entre le 29 mars et le 8 avril 2004.
24. L’enquête menée par l’IGS fut jointe à la procédure le 22 octobre 2004.
25. Entre le 20 octobre et le 25 novembre 2004, des auditions de douze policiers, des trois requérants journalistes au Point et du directeur du Point eurent lieu.
26. Le 10 janvier 2005, le juge d’instruction rendit une ordonnance de transport sur les lieux des sièges des journaux L’Équipe et Le Point afin de procéder à une perquisition pour retrouver la trace de procès-verbaux « détournés ». Ces deux perquisitions eurent lieu simultanément le 13 janvier 2005 et furent conduites par deux juges différents.
Des perquisitions furent effectuées le même jour aux domiciles des deux premiers requérants. Aucune précision n’a été apportée à leur sujet.
27. Dans les locaux du journal Le Point, il fut décidé de ne pas procéder sur le champ à une recherche des fichiers de l’ordinateur du troisième requérant pour ne pas bloquer le serveur informatique du journal. Celui-ci fut donc saisi et placé sous scellés en vue d’une étude des fichiers et fut restitué dans les heures qui suivirent. La liste de la messagerie du quatrième requérant fut éditée et également placée sous scellés. Son ordinateur fut saisi dans les mêmes conditions et aux mêmes fins que celui du troisième requérant.
28. A une date qui n’a pas été précisée, les numéros de télécopie des premier et deuxième requérants, ainsi que celui du journal L’Équipe firent ensuite l’objet de réquisitions en vue de l’établissement de listings des appels entrants et sortants.
29. Le 1er février 2005, un coureur cycliste mis en cause dans l’affaire de dopage se constitua partie civile du fait des violations du secret de l’instruction qui avaient entraîné, selon lui, une atteinte à la présomption d’innocence dont il aurait dû bénéficier.
30. Le 9 mars 2005, la continuation de la commission rogatoire du 22 septembre 2004 fut adressée au juge d’instruction. Elle comportait de nombreuses recherches téléphoniques et des auditions supplémentaires, notamment de quinze policiers dont les noms étaient apparus à l’occasion des investigations les plus récentes.
31. Le 1er juillet 2005, le juge d’instruction transmit le dossier au parquet pour que celui-ci fasse ses réquisitions en vue de la mise en examen des cinq requérants pour recel de violation du secret de l’instruction.
32. Dans son numéro daté des 2-3 octobre 2005, le quotidien Le Monde publia un entretien avec le juge ayant instruit cette affaire. Il s’y exprimait notamment comme suit :
« Le parquet m’a peu épaulé dans cette enquête. П a surtout été suiveur. Pour le ministère de la justice, Cofidis n’était pas une affaire prioritaire. Ce qui est important dans un parquet aujourd’hui est ce qui touche à l’ordre public et qui est de nature à déranger l’establishment.
Aussi médiatique fût-elle, l’affaire Cofidis n’intéressait personne sur le plan judiciaire. Elle posait pourtant un vrai problème de santé publique dans le sport. » …
A la question « Des complications particulières ont-elles émaillé l’enquête ? » le juge d’instruction répondit :
« Le vrai problème de cette enquête est que je n’ai pas pu m’appuyer sur des services de police de pointe. Le groupe surdose et dopage de la brigade des stupéfiants de Paris manquait d’expérience. La politique pénale générale de la préfecture de police privilégie les affaires de stupéfiants sur voie publique et autres. Je n’avais jamais eu un dossier avec autant de problèmes de procédures ou de management. Aucune perquisition n’a été faite ni chez Cédric Vasseur ni chez Philippe Gaumont ! Il y a eu ensuite les fausses signatures de procès-verbaux, les cheveux mélangés, les scellés placés dans une mauvaise enveloppe… Au bout du compte, le groupe a été dissous et plus personne ne voulait terminer les investigations. Le dossier était devenu un brûlot pour la préfecture. Pour leur défense, les services de police manquaient terriblement de moyens : trois ou quatre personnes seulement travaillaient sur le dossier. Le ministre de l’intérieur n’a pas mis les moyens sur cette affaire. »
Dans cet entretien, le juge d’instruction ne mentionna pas les articles publiés par les requérants.
33. La mise en examen des requérants intervint le 12 octobre 2005 pour les troisième, quatrième et cinquième requérants et le 13 octobre suivant pour les deux premiers requérants.
34. Le 2 février 2006, les deux premiers requérants demandèrent l’annulation de l’ensemble des actes relatifs à la perquisition opérée le 13 janvier 2005 au siège du journal L’Équipe et des actes subséquents, de l’ensemble des actes relatifs aux perquisitions opérées aux domiciles des requérants et des actes subséquents et de l’ensemble des actes relatifs à la mise sous scellés des listings de leurs appels et des actes subséquents.
35. Le 13 février 2006, les trois autres requérants firent les mêmes demandes concernant la perquisition du 13 janvier 2005 au siège du journal Le Point, l’interception de la ligne du téléphone portable du troisième requérant et les autres interceptions dans lesquelles seraient apparues des conversations avec l’un des journalistes requérants et l’ensemble des actes relatifs à l’analyse de leurs appels téléphoniques.
Tous les requérants invoquaient notamment les textes de droit interne protégeant les sources des journalistes, l’article 10 de la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme ainsi qu’une atteinte généralisée au secret des sources des journalistes.
36. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles rendit son arrêt le 26 mai 2006.
37. Elle rappela tout d’abord le principe de la liberté d’expression dont découlent ceux de la liberté de la presse et de la protection des sources d’information des journalistes. Elle souligna que ces principes sont essentiels dans une société démocratique garantissant à tout citoyen la liberté de recevoir, communiquer ou exprimer par écrit ou oralement des opinions ou informations.
38. Elle se référa ensuite notamment aux articles 9-1 du code civil et 11 du code de procédure pénale qui protègent le respect de la présomption d’innocence et le secret de l’instruction.
La cour d’appel constata tout d’abord que la publication de nombreuses informations couvertes par le secret de l’enquête avait causé une « gêne considérable » dans l’organisation du travail du juge d’instruction en charge du dossier qui avait indiqué que « d’ores et déjà, la quasi-totalité des personnes qui étaient sous enquête ou auraient pu être entendues comme témoins, non seulement sont averties de nos intentions, mais encore connaissent par le détail les mises en cause dont elles font l’objet ». Il avait également estimé que la parution dans le journal L’Équipe de larges extraits des interrogatoires qu’il avait menés avait « torpillé » l’instruction en cours en ayant empêché la suite des recherches, en ajoutant qu’aucune ramification ne s’ouvrirait aux enquêteurs. Il avait encore fait remarquer qu’à la date de la parution de l’article du Point le 22 janvier 2004, aucune des écoutes téléphoniques retranscrites dans cet article ne lui avait encore été communiquée.
39. La chambre de l’instruction constata enfin que, pour les personnes visées dans les articles publiés, la violation reprochée du secret de l’instruction avait entraîné une atteinte à la présomption d’innocence et que la publication de certaines de leurs conversations téléphoniques enregistrées constituait aussi une atteinte à leur vie privée.
40. Sur le fond, la chambre de l’instruction constata qu’il existait à l’évidence en l’espèce une ingérence de l’autorité publique dans le fonctionnement de la presse du fait des actes d’enquête et d’instruction accomplis aux sièges des journaux et à l’encontre de certains de leurs journalistes, ainsi que de certaines réquisitions et interceptions téléphoniques. Elle releva que les enquêteurs, puis le magistrat instructeur, cherchaient à identifier les personnes à l’origine de la violation du secret de l’instruction et celles l’ayant recelée.
41. Elle nota par ailleurs que la violation du secret de l’instruction et le recel de cette infraction avaient compromis le déroulement de l’enquête ainsi dévoilée et avaient généré une atteinte à la présomption d’innocence des personnes visées dans ces articles, ainsi qu’une atteinte à leur vie privée par la publication de certaines de leurs conversations téléphoniques.
42. La cour d’appel déclara nulles les réquisitions visant le standard du journal Le Point et celles visant les lignes des troisième, quatrième et cinquième requérants, ainsi que les pièces de l’instruction « faisant allusion » aux éléments recueillis dans le cadre de ces réquisitions.
43. Elle constata en effet qu’à la date où les réquisitions avaient été faites, aucun des journalistes visés n’avait été entendu, certains des policiers dont les auditions pouvaient être utiles n’avaient pas encore été entendus et l’identification des contacts téléphoniques entretenus par les policiers était en cours. Elle estima que de telles investigations n’étaient pas, au regard de l’article 10 de la Convention, des mesures nécessaires à ce stade de la procédure.
44. Elle ajouta que ces réquisitions avaient permis aux enquêteurs de disposer d’informations sur la totalité des correspondants, à titre personnel ou professionnel, de ces journalistes et que de telles recherches constituaient à ce stade de la procédure une ingérence disproportionnée au regard des nécessités de l’enquête en cours. Il en allait a fortiori de même s’agissant des informations identiques recueillies dans le cadre des réquisitions visant le standard commun du magazine Le Point.
45. La même décision fut prise concernant la surveillance de la ligne du téléphone portable du troisième requérant. La cour releva que la commission rogatoire du 5 octobre 2004 était intervenue avant l’audition du journaliste concerné, qui avait eu lieu le 20 octobre suivant. Elle ajouta que, pendant que la surveillance de sa ligne téléphonique était effective, les enquêteurs avaient procédé à l’audition de nombreux policiers ainsi qu’à celle d’autres journalistes. Elle estima que, de ces auditions, pouvaient ressortir des éléments utiles et même déterminants pour l’enquête, comme en particulier les identités des auteurs des violations du secret de l’instruction et que ces éléments pouvaient par ailleurs se cumuler à ceux recueillis dans le cadre de l’exécution des recherches téléphoniques visant les policiers.
Elle en conclut que cette mise sous surveillance de la ligne téléphonique du troisième requérant, bien que légale, n’était pas, au moment où elle avait été décidée et à ce stade de l’information, une mesure nécessaire au sens de l’article 10 de la Convention.
46. La cour d’appel rejeta en revanche la demande concernant la mise sous surveillance de la ligne téléphonique d’un policier, estimant que cette mesure n’avait pas à être accompagnée des précautions relatives au respect des sources journalistiques, même si son exécution avait révélé des conversations entre ce policier et le troisième requérant.
47. Pour ce qui est de la saisie et du placement sous scellés des listings des appels des premier et deuxième requérants, la cour releva qu’elles étaient intervenues après leurs auditions, que les recherches et investigations déjà faites, comme des auditions du juge d’instruction et des policiers, des auditions d’autres journalistes, des réquisitions et interceptions téléphoniques visant des policiers, s’étaient révélées insuffisantes pour permettre d’identifier les personnes ayant violé le secret de l’instruction. Elle estima dès lors que les saisies et mises sous scellés étaient légitimes, nécessaires, adaptées au but recherché et constituaient une ingérence proportionnée au regard des exigences relatives au respect des sources d’information. Elle rejeta donc les demandes sur ce point.
48. S’agissant des perquisitions et saisies opérées le 13 janvier 2005 aux sièges des journaux Le Point et L’Équipe, la cour d’appel releva qu’elles s’étaient déroulées postérieurement aux auditions du magistrat instructeur, des policiers et des journalistes auteurs des articles litigieux, ainsi qu’à d’autres investigations techniques visant les policiers. Elle considéra que toutes les mesures d’instruction effectuées antérieurement n’avaient pas permis de réunir des éléments suffisants pour permettre des mises en examen des personnes ayant violé le secret de l’instruction. Ainsi, des recherches au sein des organes de presse ayant publié les informations violant le secret de l’instruction devenaient, selon elle, la seule mesure utile à la manifestation de la vérité. En outre, elles avaient été menées rapidement, conformément au droit interne et dans le respect des principes tirés de l’article 10 de la Convention. Ces demandes furent donc également rejetées.
49. Pour ce qui est enfin des perquisitions opérées aux domiciles des deux premiers requérants, la cour d’appel considéra que les prescriptions de l’article 56-2 du code de procédure pénale ne s’appliquent qu’aux locaux des entreprises de presse ou de communication audiovisuelle et ne s’appliquent pas aux investigations menées aux domiciles personnels des journalistes. Elle releva encore que ces perquisitions avaient été opérées alors que l’information se trouvait dans le même état d’avancement qu’avant la perquisition au siège de L’Équipe et conclut que ces perquisitions constituaient une ingérence nécessaire et proportionnée au regard des exigences relatives au respect des sources journalistiques et poursuivaient un but légitime. Elle rejeta donc les demandes de nullité concernant ces mesures.
50. Les requérants se pourvurent en cassation contre cet arrêt. Ils invoquaient l’article 10 de la Convention et soulignaient que la protection des sources journalistiques est l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse et que, dès lors, les perquisitions menées dans les locaux professionnels des journalistes dans le but de découvrir la source de leurs informations, constituent un acte d’une extrême gravité s’analysant en une ingérence dans leurs droits garantis par l’article 10 de la Convention, qui ne peut être tolérée dans une société démocratique que si elle est strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi. Ils ajoutaient qu’il résultait des propres constatations de l’arrêt attaqué que la perquisition menée le 13 janvier 2005 au siège social du journal L’Équipe avait pour but d’identifier les éventuels policiers auteurs de violations du secret de l’instruction, alors qu’il existait selon eux d’autres moyens de recherche des auteurs des faits poursuivis
51. La Cour de cassation rejeta le pourvoi par arrêt du 30 octobre 2006.
Elle reprit les motifs retenus par la cour d’appel et en conclut que l’ingérence était nécessaire et proportionnée au but légitime visé, la chambre de l’instruction ayant justifié sa décision au regard des exigences de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle ajouta que l’accomplissement d’actes d’instruction postérieurement aux perquisitions diligentées n’impliquait pas que ces dernières n’aient pas été indispensables au moment où elles avaient été effectuées et que la nécessité et la proportionnalité d’un acte sont indépendantes de son résultat.
52. Elle estima par ailleurs qu’aucune disposition n’impose de rechercher l’auteur de l’infraction de violation du secret de l’instruction avant de tenter d’identifier les auteurs d’un éventuel recel.
53. Elle ajouta que les mesures critiquées avaient été mises en œuvre en raison de la divulgation du contenu, devant légalement demeurer secret, de pièces issues d’une information en cours et constituaient des mesures justifiées, tant par les impératifs d’intérêt public de protection des droits d’autrui, au nombre desquels figure la présomption d’innocence, que par la préservation d’informations confidentielles, ainsi que par la nécessité de se prémunir contre des agissements de nature à entraver la manifestation de la vérité. Enfin, la Cour de cassation estima que le droit reconnu à un journaliste de ne pas révéler l’origine de ses informations n’interdit pas de retranscrire la conversation qu’il peut avoir avec une personne dont la ligne téléphonique fait l’objet d’une surveillance lorsque, comme en l’espèce, la mesure est nécessaire à la recherche d’une infraction et proportionnée au but à atteindre.
54. Le 26 mai 2009, la juge d’instruction du tribunal de grande instance de Nanterre rendit une ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel. Elle considéra que les requérants n’avaient pas commis le délit de violation du secret de l’instruction, mais avaient commis celui de recel de pièces, notamment des procès-verbaux ou des retranscriptions d’interceptions téléphoniques du dossier de l’instruction.
55. Le 11 mai 2010, le tribunal de grande instance de Nanterre rendit son jugement dans cette affaire.
Les requérants arguaient notamment du fait que la qualification de recel qui leur était opposée était incompatible avec la loi du 4 janvier 2010 et avec l’article 10 de la Convention.
Le tribunal ne répondit toutefois pas à cet argument et, se fondant uniquement sur le fait qu’aucun procès-verbal ou extrait de procès-verbal n’avait été retrouvé au cours des diverses perquisitions, en déduisit que l’infraction de recel reprochée aux requérants n’était pas établie et les relaxa. Aucun appel n’a été interjeté contre ce jugement.
II. LE DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL PERTINENT
56. L’article 9-1 du code civil se lit comme suit :
« Chacun a droit au respect de la présomption d’innocence.
Lorsqu’une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué, aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte. »
57. Le code pénal dispose notamment :
Article 321-1
« Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d’intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d’un crime ou d’un délit.
Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d’un crime ou d’un délit.
Le recel est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. »
Article 226-13
« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »
58. Le code de procédure pénale se lit ainsi dans ses parties pertinentes :
Article 11
« Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète.
Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. »
Article 109
« Tout journaliste, entendu comme témoin sur des informations recueillies dans l’exercice de son activité, est libre de ne pas en révéler l’origine. »
Article 56-2 (tel qu’en vigueur avant la loi du 4 janvier 2010)
« Les perquisitions dans les locaux d’une entreprise de presse, d’une entreprise de communication audiovisuelle, d’une entreprise de communication au public en ligne, d’une agence de presse, dans les véhicules professionnels de ces entreprises ou agences ou au domicile d’un journaliste lorsque les investigations sont liées à son activité professionnelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat.
Ces perquisitions sont réalisées sur décision écrite et motivée du magistrat qui indique la nature de l’infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, ainsi que les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-ci. Le contenu de cette décision est porté dès le début de la perquisition à la connaissance de la personne présente en application de l’article 57.
Le magistrat et la personne présente en application de l’article 57 ont seuls le droit de prendre connaissance des documents ou des objets découverts lors de la perquisition préalablement à leur éventuelle saisie. Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d’autres infractions que celles mentionnées dans cette décision.
Ces dispositions sont édictées à peine de nullité.
Le magistrat qui effectue la perquisition veille à ce que les investigations conduites respectent le libre exercice de la profession de journaliste, ne portent pas atteinte au secret des sources en violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et ne constituent pas un obstacle ou n’entraînent pas un retard injustifié à la diffusion de l’information. (…) »
59. Le 21 décembre 2009, l’Assemblée Nationale a adopté en deuxième lecture un projet de loi sur la protection du secret des sources des journalistes. Celui-ci prévoit dans son article 2 :
« Le secret des sources des journalistes est protégé dans l’exercice de leur mission d’information du public.
Est considéré comme journaliste au sens du premier alinéa toute personne qui, exerçant sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, de communication au public en ligne, de communication audiovisuelle ou une ou plusieurs agences de presse, y pratique, à titre régulier et rétribué, le recueil d’informations et leur diffusion au public.
Il ne peut être porté atteinte directement ou indirectement au secret des sources que si un impératif prépondérant d’intérêt public le justifie et si les mesures envisagées sont strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi. Cette atteinte ne peut en aucun cas consister en une obligation pour le journaliste de révéler ses sources.
Est considéré comme une atteinte indirecte au secret des sources au sens du troisième alinéa le fait de chercher à découvrir les sources d’un journaliste au moyen d’investigations portant sur toute personne qui, en raison de ses relations habituelles avec un journaliste, peut détenir des renseignements permettant d’identifier ces sources.
Au cours d’une procédure pénale, il est tenu compte, pour apprécier la nécessité de l’atteinte, de la gravité du crime ou du délit, de l’importance de l’information recherchée pour la répression ou la prévention de cette infraction et du fait que les mesures d’investigation envisagées sont indispensables à la manifestation de la vérité. »
La loi a été promulguée le 4 janvier 2010 et la loi de 1881 sur la liberté de la presse et plusieurs dispositions du code de procédure pénale s’en sont trouvées modifiées.
60. Le 8 mars 2000, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a adopté la Recommandation R(2000)7 sur le droit des journalistes à ne pas révéler leurs sources d’information. L’annexe à cette recommandation dispose notamment :
« Principe 1 (Droit de non-divulgation des journalistes)
Le droit et la pratique internes des États membres devraient prévoir une protection explicite et claire du droit des journalistes de ne pas divulguer les informations identifiant une source, conformément à l’article 10 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (ci-après dénommée: la Convention) et aux présents principes, qui doivent être considérés comme des normes minimales pour le respect de ce droit.
(…)
Principe 3 (Limites au droit de non-divulgation)
(…)
b. La divulgation des informations identifiant une source ne devrait être jugée nécessaire que s’il peut être établi de manière convaincante:
i. que des mesures raisonnables alternatives à la divulgation n’existent pas ou ont été épuisées par les personnes ou les autorités publiques qui cherchent à obtenir la divulgation, et
ii. que l’intérêt légitime à la divulgation l’emporte clairement sur l’intérêt public à la non-divulgation, en conservant à l’esprit que:
– un impératif prépondérant quant à la nécessité de la divulgation est prouvé;
– les circonstances présentent un caractère suffisamment vital et grave;
– la nécessité de la divulgation est considérée comme répondant à un besoin social impérieux, et
– les États membres jouissent d’une certaine marge d’appréciation pour juger de cette nécessité, mais cette marge est sujette au contrôle de la Cour européenne des Droits de l’Homme.
c. Les exigences précitées devraient s’appliquer à tous les stades de toute procédure où le droit à la non-divulgation peut être invoqué.
Principe 4 (Preuves alternatives aux sources des journalistes)
Dans une procédure légale à l’encontre d’un journaliste aux motifs d’une atteinte alléguée à l’honneur ou à la réputation d’une personne, les autorités compétentes devraient, pour établir la véracité de ces allégations, examiner toute preuve à leur disposition en application du droit procédural national et ne devraient pas pouvoir requérir à cette fin la divulgation par un journaliste des informations identifiant une source.
Principe 5 (Conditions concernant la divulgation)
a. La proposition ou demande visant à introduire une action des autorités compétentes en vue d’obtenir la divulgation de l’information identifiant une source ne devrait pouvoir être effectuée que par les personnes ou autorités publiques ayant un intérêt légitime direct à la divulgation.
b. Les journalistes devraient être informés par les autorités compétentes de leur droit de ne pas divulguer les informations identifiant une source, ainsi que des limites de ce droit, avant que la divulgation ne soit demandée.
c. Le prononcé de sanctions à l’encontre des journalistes pour ne pas avoir divulgué les informations identifiant une source devrait seulement être décidé par les autorités judiciaires au terme d’un procès permettant l’audition des journalistes concernés conformément à l’article 6 de la Convention.
d. Les journalistes devraient avoir le droit que le prononcé d’une sanction pour ne pas avoir divulgué leurs informations identifiant une source soit soumis au contrôle d’une autre autorité judiciaire.
e. Lorsque les journalistes répondent à une demande ou à une injonction de divulguer une information identifiant une source, les autorités compétentes devraient envisager de prendre des mesures pour limiter l’étendue de la divulgation, par exemple en excluant le public de la divulgation, dans le respect de l’article 6 de la Convention lorsque cela est pertinent, ainsi qu’en respectant elles-mêmes la confidentialité de cette divulgation.
Principe 6 (Interceptions des communications, surveillance et perquisitions judiciaires et saisies)
a. Les mesures suivantes ne devraient pas être appliquées si elles visent à contourner le droit des journalistes, en application des présents principes, de ne pas divulguer des informations identifiant leurs sources:
i. les décisions ou mesures d’interception concernant les communications ou la correspondance des journalistes ou de leurs employeurs,
ii. les décisions ou mesures de surveillance concernant les journalistes, leurs contacts ou leurs employeurs, ou
iii. les décisions ou mesures de perquisition ou de saisie concernant le domicile ou le lieu de travail, les effets personnels ou la correspondance des journalistes ou de leurs employeurs, ou des données personnelles ayant un lien avec leurs activités professionnelles.
b. Lorsque des informations identifiant une source ont été obtenues de manière régulière par la police ou les autorités judiciaires à travers l’une quelconque des actions précitées, même si cela pourrait ne pas avoir été le but de ces actions, des mesures devraient être prises pour empêcher l’utilisation ultérieure de ces informations comme preuve devant les tribunaux, sauf dans le cas où la divulgation serait justifiée en application du Principe 3. »
61. Le 10 juillet 2003, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a adopté la Recommandation Rec(2003)13 sur la diffusion d’informations par les médias en relation avec les procédures pénales. Dans l’annexe à cette recommandation figurent notamment les principes suivants :
« Principe 1 – Information du public par les médias
Le public doit pouvoir recevoir des informations sur les activités des autorités judiciaires et des services de police à travers les médias. Les journalistes doivent en conséquence pouvoir librement rendre compte de et effectuer des commentaires sur le fonctionnement du système judiciaire pénal, sous réserve des seules limitations prévues en application des principes qui suivent.
Principe 2 – Présomption d’innocence
Le respect du principe de la présomption d’innocence fait partie intégrante du droit à un procès équitable.
En conséquence, des opinions et des informations concernant les procédures pénales en cours ne devraient être communiquées ou diffusées à travers les médias que si cela ne porte pas atteinte à la présomption d’innocence du suspect ou de l’accusé.
Principe 3 – Véracité de l’information
Les autorités judiciaires et les services de police ne devraient fournir aux médias que des informations avérées ou fondées sur des présomptions raisonnables. Dans ce dernier cas, cela devrait être clairement indiqué aux médias.
(…) »
EN DROIT
I. JONCTION DES REQUÊTES
62. Compte tenu de la connexité des requêtes quant aux faits et aux questions de fond qu’elles posent, la Cour juge approprié de les joindre, en application de l’article 42 § 1 de son règlement.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 10 DE LA CONVENTION
63. Les requérants allèguent que les investigations menées en l’espèce étaient contraires aux dispositions de l’article 10 de la Convention, ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations.
2. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. »
64. Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
A. Sur la recevabilité
65. La Cour constate que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention. La Cour relève par ailleurs qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.
B. Sur le fond
1. Argumentation des requérants
a) Les requérants Ressiot et Issartel
66.